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Journal du Barreau de Marseille
numéro 1 - 2017
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plir des fonctions juridictionnelles, et faire de l’admi-
nistration et de l’animation d’équipes. Dans la droite
ligne de la justice de proximité que j’avais appréciée,
j’ai pu m’investir dans le développement de l’accès
au droit, surtout en Haute Corse, pour rendre aux
justiciables souvent isolés géographiquement, des
services de proximité, grâce à un partenariat avec les
huissiers de justice et nos partenaires institutionnels.
La pratique du droit pénal, par la présidence des au-
diences correctionnelles en matière économique et
financière, m’a rapprochée des fonctions du parquet.
J’ai alors effectué ce choix de rejoindre le Ministère
public que j’avais d’emblée totalement écarté, pour
aborder l’autre versant du métier de Magistrat. Les 5
années passées au parquet général de Paris m’ont
convaincue, s’il en était besoin encore que le parque-
tier est en réalité le premier des juges. Il a l’opportu-
nité des poursuites et le choix des voies procédurales.
Il est le garant des libertés individuelles, mais aussi le
défenseur des intérêts de la société.
C’est dans ce strict équilibre qu’il conduit les enquêtes
et veille à l’application de la loi. Mais au-delà des
textes de loi, il y a l’humain, qu’il soit auteur ou victime.
Je crois sincèrement que mes fonctions initiales de
juge d’instancem’ont pétrie de cette notion d’huma-
nité, l’équité devant parfois prévaloir sur la règle de
droit. C’est ma conception de la justice, qui ne peut
être admise et respectée que si elle est comprise.
Lorsque je suis chargée de l’accusation devant les
cours d’assises, je ne me départis jamais de cette
règle pour faire juger des actes, il faut tenter de com-
prendre l’humain qui les a commis. La peine deman-
dée et bien sûr prononcée doit être à la mesure de
ces deux facteurs.
Actuellement, particulièrement en charge de la coo-
pération pénale internationale au
parquet général d’Aix-en-Pro-
vence, je fais ce constat que de la
justice de proximité exercée dans
mes premières fonctions, je me
consacre désormais à une justice
ouverte sur le monde. Face à une
criminalité qui profite des fron-
tières pour s’organiser, il convient
impérativement de favoriser l’en-
traide policière et judiciaire inter-
nationale.
Ayant ainsi occupé des fonctions
de poursuite et de jugement, je
suis plus que jamais attachée à
l’unité du corps de la magistra-
ture il m’apparaît indispensable de résister au mo-
dèle anglo-saxon. Il convient de maintenir une for-
mation unique et une carrière souple favorisant les
passages dans les deux corps. C’est ce qui constitue
la richesse de notremagistrature française. Mieux en-
core, les jeunes magistrats sortant de l’école de Bor-
deaux, devraient occuper obligatoirement deux
fonctions : celle de juge d’instance et celle de substi-
tut, deux fonctions qui forment à l’école de la vie.
Je regrette profondément le fossé qui se creuse
entre avocats et magistrats. Nous appartenons pour-
tant à la même famille, et la finalité de nos fonctions
est là même : que justice soit rendue, la meilleure
possible.
Ainsi, il est souhaitable de veiller à fonctionner dans
le respect de nos rôles respectifs. Il m’est particuliè-
rement difficile de constater les postures adoptées
par certains avocats qui pratiquent une défense de
rupture, et utilisent les médias au profit de leur noto-
riété ce qui contribue à creuser ce fossé entre nous.
Puissent les jeunes avocats ne pas être tentés par le
chemin de la discorde. La justice à tout à y perdre.
LE 8 MARS EST LA JOURNÉE INTERNATIO-
NALE DU DROIT DES FEMMES. AVEZ-VOUS UN
MESSAGE PARTICULIER OU UN RETOUR D’EX-
PÉRIENCE À COMMUNIQUER À NOS LEC-
TEURS ?
Le fait d’avoir été femme n’a jamais constitué un obs-
tacle dans l’exercice de mes fonctions. Je déplore
seulement que les postes de responsabilité au par-
quet soient encore trop souvent réservés aux
hommes, la féminisation importante de notre corps
devrait pouvoir pallier ce handicap dans les années
à venir.
DOSSIER
Femmes
de justice