JDB N1 2020

EDITO 5 1 e r SEMESTRE 2020 JOURNAL DU BARREAU DE MARSE I L LE Les nouveaux Hussards En raison de l’état d’urgence sanitaire, notre numéro du premier trimestre du Journal du barreau n’a pas pu être publié. Le comité rédactionnel, réuni en visioconférence, a donc décidé de publier un numéro semestriel spécial in- corporant le dossier MARD préparé à l’époque, qui demeure plus que jamais d’actualité et que nous avons mis à l’honneur en couverture, en lieu et place du mouvement de grève historique des avocats en contestation du projet de réforme des retraites. En effet, si le confinement a stoppé subitement notre historique mobilisation générale, chaque cabinet a depuis repris, ou tenté de reprendre son activité, tant bien que mal, parfois dans des conditions très difficiles, avec une orga- nisation nécessaire du télétravail, des mesures de distanciation sociale, une nouvelle relation clientèle et l’étude des nombreux textes législatifs et règle- mentaires adoptés frénétiquement ces dernières semaines. Notre pays souffrait depuis longtemps déjà d’une Justice en voie de déshuma- nisation. Les mesures prises post-confinement nous le rappellent cruellement au quotidien : la Justice ne jouit pas des moyens nécessaires matériels et hu- mains pour assurer un service public de proximité efficace. Dans le cadre des plans de continuation d’activité, tout ce que nous craignions et dénoncions hier se révèle pire encore puisque nous subissons une désorgani- sation préoccupante de la Justice, dont chaque chambre de chaque tribunal nous impose une méthode diffé- rente, et nous interroge forcément sur la dématérialisation à outrance, qui fait disparaître l’avocat des palais de Justice. Alors qu’il y a quelques semaines, et pour la première fois, notre profession parlait d’une seule voix, que nous avions pu vivre une véritable explosion de créativité avec les nombreuses actions symboliques qui ont été mises en place, parmi lesquelles, sans que la liste ne soit exhaustive (outre les chansons et vidéos), notre bar- reau a organisé le procès de la réforme des retraites, l’accrochage de nos robes aux grilles du Palais, l’allumage de 1200 bougies sur les marches du palais, le dépôt massif de demandes de mises en liberté, l’organisation des consultations gratuites, ou encore la participation de 600 avocats en robes au Stade Vélodrome. Nous avions réussi à remettre sur la table des négociations tous les sujets relatifs à la profession, notamment l’aide juridictionnelle, la force exécutoire de l’acte d’avocat ou le taux réduit de TVA pour les honoraires payés par les particuliers. Plus que jamais, nous devons rappeler le caractère fondamental du principe d’indépendance de la profession d’avocat, y compris dans ses aspects économiques et sociaux, pour garantir l’avenir de nos cabinets et l’accès au droit des justiciables. Alors qu’à Marseille, lors des dernières élections municipales, le taux de participation avoisinait les 35 %, le taux de participation pour l’élection de notre futur bâtonnier était de 86,36%, ce qui met en lumière la force de notre barreau. Alors que le monde, l’Europe et la France sont touchés par une crise d’une extrême gravité et d’une violence inouïe, de nombreux bouleversements sont en cours tels que notamment, changements climatiques, crise du modèle occidental, perte de compétitivité, dérégulations financières, déficits publics et recul de l’État. Nous ne pouvons que déplorer la perte des repères et des valeurs. Dès sa naissance, alors que la République était assiégée, une cavalerie légère, les Hussards de la Mort, se bat- taient pour la défendre des menaces extérieures. Au début du XXème siècle, des instituteurs, les Hussards Noirs, étaient en première ligne pour défendre nos valeurs républicaines. Désormais, notre République a be- soin d’être défendue par une nouvelle génération de Hussards, une addition de volontés et de talents. Notre République doit être armée pour défendre ses valeurs et le vivre ensemble avec rigueur et exigence. Encore et toujours, la République a besoin de ses avocats. Nous sommes ses nouveaux Hussards. JULIENAYOUN Directeur de la Publication