JDB N1 2020

LE RÉFÉRÉ LIBERTÉ À L’ÉPREUVE DE LA CRISE SANITAIRE  Pendant la crise sanitaire et l’état d’urgence sanitaire, le juge administratif a été mis à rude épreuve. Il s’est penché sur la question de l’IVG par voie médicamenteuse, a annulé la procédure de passation du marché public du stade de la Meinau, s’est prononcé sur le recours de l’Olympique Lyonnais Groupe contre les décisions par lesquelles le conseil d’administration de la Ligue de football professionnel a mis fin à la saison 2019-2020 et enregistré le clas- sement des championnats de Ligue 1 et de Ligue 2, ou encore au sujet de l’épandage des pesticides à proximité des habitations (CE, ordonnance 5 mai 2020). Il a surtout été en première ligne et extrêmement sollicité pendant la crise sanitaire, essentiellement via le référé liberté. Le référé suspension a été aussi pratiqué, par exemple au sujet de l’IVG médicamenteuse à domicile durant l’état d’urgence sanitaire (CE, ordonnance 22 mai 2020, n° 440216, 440317). Le 4 juin 2020 lors d’une conférence sur le thème de la séparation des pouvoirs, dans le contexte de la crise du Covid-19, le vice-président du Conseil d’État a d’ailleurs exposé la manière dont le Conseil d’État s’est organisé «pour garantir l’État de droit» dans de telles circonstances. Ce qui suit ne prétend ni à l’exhaustivité ni à l’analyse savante. C’est un prétexte à aller (re) lire la production jurisprudentielle très riche. Pour aller plus loin et utiliser dès aujourd’hui les enseignements de la grille de lecture et de l’office du juge du référé liberté. Les nouvelles du droit public Spécial «Covid 19» CHRISTIAN BAILLON-PASSE LIBRES PROPOS Le problème des restrictions aux libertés a été au cœur des contentieux, avec évidem- ment l’enjeu des libertés fondamentales au sens de l’article L 521-2 du CJA. INTERDICTION D’ACCÈS AU LITTORALE ET LIBERTÉ D'HÉBERGEMENT La question s’est posée de l’interdiction d’accès au littoral à l’occasion de l’arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales qui avait restreint les possibilités de sorties en pé- riode de confinement (TA Montpellier, n° 2001660, ord. 7 avril 2020). Il y a eu celle de la limitation de l’hébergement dans la com- mune à toute personne non domiciliée de manière permanente durant toute la durée du confinement avec au passage celle du pouvoir de police du maire (TA Grenoble, ordonnance n° 2002394, 28 avril 2020). LES DRONES DE SURVEILLANCE La question des drones de surveillance a fait l’objet d’une ordonnance remarquée et largement commentée. En jeu la décision du préfet de police ayant mis en place un dispositif visant à capturer des images par drones et à les exploiter afin de faire respecter les mesures de confinement. Le juge du référé vise le droit au respect de la vie privée «qui comprend le droit à la protection des données personnelles» et la liberté d’aller et venir et enjoint à l’État de cesser de procéder aux mesures de surveillance par drone non pas à titre définitif, mais «tant qu’il n’aura pas été remédié à l’atteinte caractérisée au point précédent, soit par l’intervention d’un texte règlementaire, pris après avis de la CNIL, autorisant, dans le respect des dis- positions de la loi du 6 janvier 1978 appli- cables aux traitements relevant du champ d’application de la directive du 27 avril 2016, la création d’un traitement de don- nées à caractère personnel, soit en dotant les appareils utilisés par la préfecture de police de dispositifs techniques de nature à rendre impossible, quels que puissent en être les usages retenus, l'identification des personnes filmées » (CE, 18 mai 2020, n° 440442, 440445). FAIRE DU VÉLO PENDANT LE CONFINE- MENT ÉTAIT-CE POSSIBLE? Ce n’était pas clair, alors on a saisi le Conseil d’État afin qu’il ordonne au Gou- vernement «d’indiquer expressément que le vélo pouvait être utilisé durant le confi- nement et de rouvrir les pistes cyclables fermées et d’enjoindre au ministère public de cesser de poursuivre les verbalisations ayant pour motif l’usage du vélo». Le juge des référés fait droit à un partie des de- mandes en estimant que l’utilisation du vélo relève de la liberté d’aller et venir et du droit de chacun au respect de sa liberté personnelle «et que l’absence de clarté des positions du Gouvernement y portait une atteinte grave et manifestement illégale». Cette dernière formule sur «l’absence de clarté des positions du Gouvernement y portait une atteinte grave et manifestement illégale» est très intéressante et il faudra s’en souvenir pour d’autres référés libertés! ET LES AVOCATS? L’Ordre des avocats au barreau de Mar- seille avait demandé au juge d’enjoindre à l’État de fournir des masques de protection, gants, blouses de protection et gels hy- LE CONFINEMENT : LES LIBERTÉS FONDAMENTALES MENACÉES ? 57 1er SEMES TRE 2020 JOURNAL DU BARREAU DE MARSE I L LE

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