JDB N1 2020

C ’ est dans ces conditions que la quatrième puis la cinquième directive européenne ont été adoptées, cette dernière en juin 2018 et transposée en droit français le 12 février 2020. Le but affiché est de protéger l’intégralité du système écono- mique et financier en luttant contre le blanchi- ment de capitaux comme étant un processus consistant à réintroduire dans l’économie légale des produits d’infractions pénales consécutives non seulement aux activités de criminalité or- ganisée, mais aussi les abus de biens sociaux ou encore la fraude fiscale… Ces dispositions légales transcrites dans le Code monétaire et financier s’appliquent à tous les acteurs économiques de notre so- ciété, dont les avocats. Sous l’angle déon- tologique, notre profession était soumise à un devoir de prudence tel qu’édicté à l’ar- ticle 1.5 du RIN qui stipule « qu’en toute circonstance, la prudence impose à l’avocat de ne pas conseiller à son client une solu- tion s’il n’est pas en mesure d’apprécier la situation décrite, de déterminer à qui ce conseil ou cette action est destiné, d’iden- tifier précisément son client. » Mais ce même article ajoute que l’avocat « est tenu de mettre en place au sein de son cabinet une procédure lui permettant d’apprécier, pendant toute la durée de sa relation avec le client, la nature et l’étendue de l’opération juridique pour laquelle son concours est sollicité. » Enfin, « Lorsqu’il a des raisons de suspecter qu’une opération juridique aurait pour objet ou pour résultat la commission d’une in- fraction, l’avocat doit immédiatement s’ef- forcer d’en dissuader son client. À défaut d’y parvenir, il doit se retirer du dossier. » Il convient également de rappeler l’article 324-1 du Code pénal définissant le blan- chiment comme étant le fait de faciliter, par tout moyen, la justification menson- gère de l’origine de biens ou de revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indi- rect. Constitue également un blanchiment le fait d’apporter un concours à une opé- ration de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit… Les activités soumises à la lutte contre le blanchiment sont limitativement énumé- rées à l’article L 561-3 1er du Code mo- nétaire et financier relatif aux transactions financières ou immobilières ou fiduciaires et l’assistance dans la préparation ou la réalisation des transactions. Fort heu- reusement, et après nombreux débats et échanges avec notre profession, ont été exclus du dispositif, les activités se ratta- chant à une procédure juridictionnelle et les consultations juridiques à moins qu’elles n’aient été fournies à des fins de blanchi- ment de capitaux ou de financement du terrorisme ou en sachant que le client les demande aux fins de blanchiment de capi- taux ou de financement du terrorisme. Les avocats doivent justifier avoir mis en place un dispositif au sein de leur cabinet pour respecter les dispositions ci-dessus rappelées, à savoir : Procédure interne au sein du cabinet (les kits du CNB sont à disposition) : - Organisation humaine et matérielle adaptée à la taille des structures - Formation du personnel, des collabo- rateurs, veille juridique, identification des risques… Ceci suppose également que les cabinets d’avocats soient à même de justifier de ces mesures, et ce pendant 5 ans à compter de la cessation des relations avec le client. Naturellement, s’agissant d’obligations déontologiques, l’Ordre est chargé de vé- rifier que chacun respecte ses obligations au moyen de contrôles et de vérifications le cas échéant approfondies sans que le secret professionnel ou le secret des af- faires puisse lui être opposé. Le pouvoir de contrôle et d’investigation est assorti d’un pouvoir de sanction, si les obligations résultant de l’article L 661-2 ne sont pas respectées. À titre d’exemple, une carence dans l’organisation des procédures internes de contrôle pourra être considérée comme un manquement déontologique susceptible de procédure disciplinaire. Il convient de rappeler que les contrôles LCBFT se dis- tinguent des contrôles de comptabilité qui reposent sur un autre fondement. Ces nouvelles normes surviennent dans un contexte pour le moins chaotique mettant à la charge des avocats des procédures ad- ministratives contraignantes. LA CARPA PHILIPPE CORNET PRÉSIDENT DÉLÉGUÉ DE LA CARPA En 1989 à Paris, a été créé, lors d’un sommet du G7, le Groupe d’Action Financière sur le Blanchiment des Capitaux (GAFI), destiné à mettre au point une action coordonnée à l’échelle internationale. Son action consiste à élaborer des recommandations lesquelles doivent être intégrées par chaque état à travers des dispositifs législatifs ou règlemen- taires, il en assure également la promotion et l’application des normes. Le GAFI, le barreau et l’avocat 18 1 e r SEMESTRE 20200 JOURNAL DU BARREAU DE MARSE I L LE

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