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Journal du Barreau de Marseille

numéro 2 - 2016

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« l’éthique et la politique sont-elles encore liées, sont-elles

encore associées ?»

Avec habileté il suggérait d’intercaler entre ces deux

termes la conjonction de coordination « ou » pour oppo-

ser ces deux valeurs, affirmant « éthique ou politique

cette formulation raisonne comme une fatalité elle est en

quelque sorte l’écho lancinant d’un désenchantement

des citoyens pour les affaires publiques désenchantement

né de comportements reprochables et reprochés à ceux

qui ont été choisis pour administrer la cité. Pour autant

personne ne saurait affirmer qu’il existe en matière

d’éthique-politique un principe équivalent au principe de

légalité qui permet de distinguer préalablement à toute

action ce qui est défendu de ce qui est autorisé ».

Et d’illustrer son propos par l’affaire Clinton/Lewinsky

« un homme politique qui parce qu’il a eu une aventure

hors mariage avec l’une de ses collaboratrices, a dû pré-

senter sous la pression de la presse, de ses opposants, des

citoyens, ses excuses à tout un pays … cela au nom de

l’éthique. »

« Est-ce bien éthique « se demande Maître Neiller » d’exi-

ger pareille chose au nom de l’éthique politique alors que

Colin Powell a trompé le monde en affirmant éhonté-

ment que Saddam Hussein détenait des armes de des-

truction massive, son mensonge n’ayant qu’un seul but

justifier la guerre coute que coute. Et de conclure « en po-

litique il y a autant d’éthique qu’il y a de citoyens, autant

de citoyens qu’il y a d’hommes, l’éthique est dangereuse

parce qu’elle fait de l’acteur politique non plus un homme

mais un concept. »

« En politique l’éthique n’est rien d’autre que la petite

laine des hommes frileux à défendre leurs droits, j’ai la fai-

blesse de penser que la frilosité est l’ennemi du courage

et le courage c’est de ne jamais renoncer à affirmer ses

idées et ses valeurs, même contre les pesanteurs éthiques

ou morales, qui pourraient nous en dissuader, sans cou-

rage il n’y a pas de liberté, définitivement le préfère la

chaleureuse liberté à la frileuse éthique ».

Me ashkhen harutyunyan : 3ème lauréat exæquo

avait également choisi « peut-on arrêter le mou-

vement des vagues ? »

Usant d’images bouleversantes, notre consœur regrettait

de « n’avoir pu arrêter le mouvement des vagues qui me-

naient Aylan et sa famille vers une meilleure vie où la paix

est la règle où les droits de l’homme ne sont pas bafoués

ou la vie humaine est inviolable et sacrée. »

Elle rappelait que « les mouvements des vagues de solida-

rité sur les réseaux sociaux, les vagues d’indignation de

l’humanité bouleversée s’étaient calmés contrairement

aux mouvements des migrants continuant de perdre leurs

rêves, leurs enfants, leur vie, en essayant de fuir la guerre

les persécutions pour retrouver un avenir, une vie. »

Et nous interrogeait : « jusqu’où nous allons les pousser

pour créer des images-chocs susceptibles de réveiller

notre conscience, en France la patrie des droits de

l’homme, terre d’asile où il n’y a plus de place pour ceux

qui en demandent ? ».

Elle rappelait le droit constitutionnel, la convention inter-

nationale relative aux statuts des réfugiés, la convention

de Genève, et disait: « aujourd’hui notre politique migra-

toire, repose sur une absurdité érigée en dogme, s’il y a

trop de migrants c’est qu’ils sont trop nombreux et on re-

vient au mouvement incessant des vagues dans un

monde où chacun se renvoie la balle, car ce sont bien nos

gouvernants de l’Union européenne qui ont passé un ac-

cord ou plutôt un marchandage honteux avec la Turquie

qui prévoit de renvoyer vers ce pays les migrants et les ré-

fugiés syriens qui ont tenté de rejoindre illégalement l’Eu-

rope. Peut-on arrêter le mouvement des vagues avec ce

type d’accord ? Et de prendre la parole, car elle dit voir

l’histoire se répéter « en pensant à mes ancêtres qui ont

péri sur les routes des marches longues imposées par

leurs bourreaux. J’ai grandi avec l’idée que le génocide n’a

pas pu être évité du seul fait qu’au début des années 1900

le défaut de moyens d’informations n’a pas permis à la

communauté internationale d’être informé et d’interve-

nir pour sauver des vies innocentes » et de rêver d’une

vague unie et solidaire.

Ainsi les jeunes confrères, s’exprimant avec éthique dans

le cadre de la politique de tradition du barreau, perpé-

tuaient l’oscillation d’un exercice fait d’éloquence, d’enga-

gement, mais aussi d’humour, affrontant avec audace et

brio des sujets prétextes à la démonstration d’un talent

oratoire et d’un tempérament de tous les diables.

Merci à tous les candidats:

Thibault Brenti - Justine CataniI - Cynthia Clément -

Hakim Daimallah - Béatrice de Blay de Gaix - Hélène de

Ferrières - Marine Delaire - Delphine Durand - Ashkhen

Harutyunyan - Jean Jodeau - Pierre Le Beller - Nicolas

Marty - Brice Michel - Romain Neiller - Baimanai Ange-

lain Poda - Zoé Poncelet - Sophie Rolland - Nadia Seddaiu-

Emmanuelle Tronchere-Attard - Thomas Vartanian.

Au président Georges Michel Lecomte et aux membres

du jury:

Fabien Bousquet - Marie-Dominique Poinso-Pourtal - Flo-

rence Donato - Stéphanie Léandri-Campana - Philippe

Amram - Louisa Straboni et Sarah Zenou.

Et à Monsieur le Bâtonnier Fabrice Giletta.

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